Portrait photographique d'Artaud par Georges Pastier , vers 1946 - 1948 |
Voilà longtemps que j'ai senti le Vide, mais que j'ai refusé de me jeter dans le Vide.
J'ai été lâche comme tout ce que je vois.
Quand j'ai cru que je refusais ce monde, je sais maintenant que je refusais le Vide.
Car je sais que ce monde n'est pas et je sais comment il n'est pas.
Ce dont j'ai souffert jusqu'ici, c'est d'avoir refusé le Vide.
Le Vide qui était déjà en moi.
Je sais qu'on a voulu m'éclairer par le Vide et que j'ai refusé de me laisser éclairer. Si l'on a fait de moi un bûcher, c'était pour me guérir d'être au monde.
Et le monde m'a tout enlevé.
J'ai lutté pour essayer d'exister, pour essayer de consentir aux formes (à toutes les formes) dont la délirante illusion d'être au monde a revêtu la réalité.
Je ne veux plus être un Illusionné.
Mort au monde ; à ce qui fait pour tous les autres le monde, tombé enfin, tombé, monté dans ce vide que je refusais, j'ai un corps qui subit le monde, et dégorge la réalité.
(L'intégralité du texte peut se lire ICI)
Antonin Artaud - Les corps de terre, 03 Mai 1946 |
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