vendredi 29 avril 2011

Rubaiyat

Illustration for Omar Khayyam's Rubaiyat by Ronald Balfour (1920)




Music: Márta Sebestyén -Szerelem, szerelem




mardi 26 avril 2011

Art Brut - Schizophrenic artists
























A collection of art by people with schizophrenia. From the books
 "Outsider Art: Spontaneous Alternatives" and "Beyond Reason: Art and Psychosis"
.



dimanche 24 avril 2011

Jungle Spirits, Pablo Amaringo, In Memoriam

Jungle Spirits, Jungle Sounds, The Nature Recording Reference Series. 
In Memoriam, con algunas obras de Pablo Amaringo (1943- 2009).







mercredi 20 avril 2011

Guy Reibel - Suite pour Edgar Poë: Ombre

Edgar Allan Poe



Récitant: Laurent Terzieff
French Electroacoustic Spoken
l'ensemble vocal "Musique Nouvelle" Christine Defressine
I.N.A G.R.M 1983



Laurent Terzieff

lundi 18 avril 2011

Joyce Mansour « Le désir du désir sans fin »

Je te croyais roux
Bouc lippu de ma tendresse
Indifférente
Matière gommeuse aux lignes fuyantes
Et arides couchants d'opium
Le froid augmente dans la clairière
Mes poumons refleurissent
D'un sanglot flamboyant
Plus glacé qu'une gravure
Plus sérieux qu'un helléniste
Au Panthéon
Tu m'observes
Et quelque chose de dominateur
Pétrit mon épiderme de ses volontés convulsives

J'ai ouvert mes bras
Ma grande plaie saline
Sous la passerelle de l'hiver
Et aussitôt l'objet remua
Craintivement dans sa cage
Et le violoncelle tapi
Dans l'oreille triste de l'escalier
A la manière d'une flèche brisée
Dans une bouteille d'encre de Chine
Hoqueta une note teintée
O industrieuse Isis
De souffrances orientales


Serai-je un jour déçue
Le vent renouvellera-t-il
L'herbe du canapé
Saurai-je flotter sans baromètre
Ni flasque pylône
Autour des jarres du crépuscule
Serai-je un jour ruisseau
Quand tout en toi crie feu

Il m'est difficile de penser à la mort
Quand sur mon ventre hésitent de grands oiseaux
Aux pâles retards de sperme
Et habiletés d'écume
Je ne saurai suivre la trame
Des tortures mythologiques
Ni dénombrer les gémissements
Des coléoptères de salon
Quand sur l'épaule de la tumultueuse girafe
Ta chemise vient cracher son ombre.

Je ne crains pas la colère des chambres secrètes
Ni la mâchoire féconde de l'armée carnassière
Aucun homme avec moi ne place son pied
Sur la pente calcinée de la haine
L'arbre immergé passe aux sons de l'enjôleuse cithare
Je me vengerai de ta racine aux narines empourprées
La Veuve Noire fermera ses lèvres de pierre
Sur ta grande nervosité
Chaste trouée du sommeil
Tu ne sauras m'échapper

Qui connaît le profil de ma voluptueuse rosace
Plus frénétique encore
Que l'anémone frileuse
Elle trempe sa tige étroite
Dans  l'autre Seine
Pourquoi mes doigts portent-ils
De petites têtes de mort
A leurs douces extrémités
Ces brûlants serpents aux onglées exquises
Flattent ton orgueil sans jamais en démordre

Que de calamités sous les tréteaux de la banquise
Étirée comme l'horizon dans un hublot de fourmilière
Défenestrée comme lui
J'enjambe ta bouche
Ta balustrade
J'étale
Ma lourde frisure
En filigrane
Sur la cascade de ta vigne

Ici un lapin passait naguère
Sa vie errante souple et flottante
Sur le candélabre de l'inaction
Aux sept branches de supplices
Aux homélies anciennes
Sauvez-moi cria-t-il du haut de sa passion
Personne n'entendit le brûlot amarante

Ta bouche se montre vorace de jouissances enfantines

Tu te souviens des monts velus de l'Angleterre
De ses figures de boue
Piquées
Au flanc de la semaine
Comme des mots proclamés
Trop fort
Dans le vent envenimé de la tombe
Il y a des morts qui respirent dans la profusion tropicale
D'avant hier
Des mères comme la mienne
Qui toujours des anniversaires se souviennent
Beaux et clairs présents
Cheveux et dents salés
Mamelles concaves
Tristes échos de cimetière

J'attends oui j'attends
Me croyant délivrée
Des notes musicales assoiffées de paperasse
De ces yeux de basilic
Dans leur pagode de verre
Qui cuvent des cauchemars sous leurs jupons noirâtres
Et qui crient
Est-ce bien nécessaire
Sur une carte de visite
De jurer la fidélité
Quand le temps dans sa niche
Fait l'école buissonnière

Je sais que sous le pont
Tes yeux fous se sont noyés
Notre-Dame entrebâille ses savantes cuisses gothiques
Plus puissantes et plus fières
Qu'échafauds et belladones
Elles enferment ton roux visage
Dans le losange de vendredi

Je vois
Un petit lit de fer
Aux teintures douceâtres
Et volutes de léproserie
Un vaste choix de boursouflures
Sur la poitrine incrustée
De joyaux exclusifs
Je sens ton sexe gouaché de parfums
Féroce cache-pot de porcelaine
Plonger dans ma rétine

Éclats et arrachements du spasme vaginal
Il faut empêcher le pendu
D'avaler sa langue
Je sens sur mon coccyx
Un battement douloureux
Je voudrais couler pensive
Dans la blanche crème de tes artères
Glisser ma main nue sur l'échine moite de ta corolle
Mater ta glande cuivrée aux barbares carnets de neige
Je suis le tourbillon de Gomorrhe

( Extrait de la revue « La Brèche » n°5 Octobre 1965 )






vendredi 15 avril 2011

TED JOANS « La maison d'André Breton »


A Adrien Dax

Il y a deux immenses fenêtres
Béantes d'avoir connu
La féroce haleine d'une colère d'hiver
Quoiqu'un grigri en habits de pangolin
Empêchaient les laborieux dérapages des dagues
Sur la large bouche de verre où une moraine
De cristal se prosterne devant des images comme
des bocaux.
A l'usure d'un certain jour, quand les chaussettes
Laissent à la vue l'ongle d'un orteil, comme si
Nul marteau ne fonctionnait bien sans
Faucilles, ensuite un petit verre transparent
Tenta de se suicider d'un plongeon
Non au travers de la fenêtre drapée
De rideaux mais par un saut au
Bord d'un plancher inachevé, la tentative
Échoua bien sur, ne causant que
D'éternelles rides au visage
Du danger et blâmant
Les camions fauteurs de secousses
Les putes du quartier sismographiaient
Le prix des passes sauf en bas de la colline
A Montmartre où ne grincent ni ne gémissent
Plus les moulins seulement grincent
Le swing mécanique des putains « jive »
Et le perfide gémissement du jour
Un dollar suranné mais celles qui exhibent
Ce qui est trop bon pour rester caché
Possèdent un yen pour le Yen oriental
Ah ah c'est facile de sembler aussi
Simples et scrupuleuses que ces
« Crèmes à vendre » contre de l'argent
Japonais ou Allemand si peu
Nombreux que j'ai déjà cité plus
Haut – et je me demande si
Montmartre reçut des japonais
Habillés en militaires pendant
Les années de l'occupation allemande
Si Montmartre écarta ses grandes
Cuisses de pains à tous ceux qui avaient
L'appétit aussi fort que l'envie de baiser ?
Bientôt le sommeil va tout recouvrir, oui
Qui c'est qui à la maison
42 roues fontaines
Qui font un grand tour du monde
Où les globe-trotters pointent avec
Leurs cartes fumantes et fumerollantes
Les laissent tomber dans le pucelage
En chaleur de son plafond débouclé
Comme si c'est aussi une mère
Plus qu'une verrue invisible
Qui sue la beauté plus qu'un
Pubis public à la Place Blanche
Pendant que la saison s'exorcise d'une
Optique symétrique de farine d'avoine comme
Les goémons eux-mêmes se brûlent
Aussi ignorants que les Sherloquets (hommes
Et femmes) des iotas de tracteurs fermiers
D'où suinte le foutre après le rêve
Plus foudroyant que les cabines téléphoniques
De la gnôle vomissent des appels longue distance
A/ donc Black and His Seven
Sharp Darts qui collent
De bas en haut des banques du sang
Des vampires accentués des chevilles
Coagulées partagées et encore partagées
Les saintes eaux qu'on pisse par bock
Des buffles titubent jusqu'à la porte
Cousue et recousue en tripaille de bouc
Eux-mêmes sauvages comme de l'andouillette
Seconde portion de biscuits invisibles
Qui arranges des mariages contre du pognon
Bateaux rôdent au désert contre
Des boucles d'oreilles mises en ordinateur
Qui piquent du sable cuit dans une
Salade cuite dans un four d'argile
Mais qui à part l'aluminium se gonfle
Vers le rhinocéros oryctérope
Sur tapir sur pangolin sur okapi
Sur échidné sur ornithorynque bons
Termes pour un seau en sève de baobab ?
« Lisez ma semence giclée lentement »
Nous déchiffrâmes à la caverne
Dans laquelle notre case qui couva
Des gratte-ciels dans les hauts Montmartre
De demain en Afrique
Les murs sont tapissés de livres
Ce sont des murs ouverts
D'où coule la connaissance

( Traduit de l'américain par P. Wood et G. Girard )






Ted Joans à la galerie la Triskèle Paris

vendredi 8 avril 2011

Hans Sebald Beham

Hans Sebald Beham (1500--1550) was a German printmaker who did his best work as an engraver, and was also a designer of woodcuts and a painter and miniaturist. He is one of the most important of the "Little Masters", the group of German artists making old master prints in the generation after Dürer.
The older brother of Barthel Beham by two years, he was born into a family of artists in Nuremberg. In 1525, along with his brother and Georg Pencz, the so-called "godless painters", he was banished from Nuremberg, accused of heresy (against Lutheranism), blasphemy and not recognising the authority of the City council. Within months the three were allowed to return to the city, but Beham was exiled again in 1528 for publishing a book on the proportions of the horse regarded as plagiarised from an unpublished manuscript by Albrecht Dürer, who had recently died. After a period spent working in various German cities, from 1532 he lived mostly in Frankfurt until his death in 1550.



Music Montedoro- Al Qantarah- Sicilian XII century music;
Fabio Tricomi, Fabio Accurso


Vitrum nostrum gloriosum, Anonymous, The King's Singers, Madrigal History Tour.
Works by Hans Sebald Beham (1500--1550).

jeudi 7 avril 2011

Shuzo Takiguchi "La création de la terre"

La création de la terre

Le grillon bipolaire chante sur les cheveux crépus
                                                                 d’Aphrodite
Un homme des animaux tous sont devenus calmes
                                                           comme la mer
La métamorphose estivale d’Aphrodite
En un mâle ou en un microbe
Fleur de déchéance
Et je deviens vulnérable comme un adolescent sous la
                                                                                lune
Les conjurés
Tiennent haut les lampes-torches pour éclairer le creux
                                                                        des vagues
A leurs oreilles le rossignol chante à merveille
Et le temps de se demander si ce chant annonçait une
                                                                   brise légère
L’averse s’abattit
Si jamais un vrai miracle se produit dans pareille fleur
                                                                     d’hortensia
Il finira par épuisement total
Vin au poignard
Le froid de la terre adhère à la cravate
L’homme ivre mort devant le teint dorade sublime
Que revêt le soleil retrouve son sourire
A ce moment l’univers légèrement se meut
Dorade dans son dos qu’il ignore
Sursaut d’un navire qui prend son baptême de mer
Il s’embrouille dans l’alphabet
Et médite avec le ciel bleu de son cerveau
Un jeune pigeon dans son vol s’y fourvoie
Les joyaux de son collier ruissellent
Leur frémissement a la fraîcheur d’un voilier
Immobile comme la vague déchaînée ou le cheval au
                                                                             galop
le jugement dernier n’aura pas lieu
Zéro parfois même un zéro de cette taille
Un passe-velours qui oublie le visage du  maître
                                                                 jardinier
Fleur invisible sans miroir concave
Etait-ce cela la fleur de son sein ?
Les flots qu’aucun frein n’arrête se brisent encore et
                                                                           encore
Poitrine superbe  celle d’une femme
Par un mercredi magnifique
Enveloppée d’un châle à l’ancienne
La poitrine d’une femme qui du haut d’une pagode
                                                       s’approcha du sol
Celle qui pareille aux aréquiers dormit jusqu’à midi
                                                                           juste
Une poitrine de reine
Si tu cries que tu voudrais voir une fleur plus explicite
Suffit de l’approcher sans détour comme un prestidi-
                                                                          gitateur
Et l’interjection en hausse
Je la pose sur la table
La grande magie n’a pas besoin d’air
Quand le jasmin envers et contre tout refusait de se
                                                                         montrer
La jeune fille là-bas tout simplement imagina
Un jasmin métallique
Le souffle du dieu Apollon agonisant
Peur et joie mêlées
Se confond à la rose pareille à la viande d’agneau
Aucune vie aucun lait d’une telle fraîcheur
N’appartiennent à la Terre
Les yeux d’Apollon qui rend son dernier soupir comme
                                                                           un saint
Peuvent être peints même avec les couleurs d’un arc-
                                                                    en-ciel brisé
Quand il vint réchauffer ses oreilles d’enfant le dieu
                                                                        Apollon
Devint sourd-muet à l’image du soleil
Diamant ramolli en un instant   voici son tronc tout
                                                                           entier
En toute exactitude voici du pain au raisin
En toute la splendeur effrayante voici exposé l’art des
                                                           jardins du paradis
Le paradis s’enfouit dans le creux d’une noix
Ce qu’aperçut le marin n’était qu’une affiche bigarrée
Il en sourit d’un sourire d’automne si doux
Et c’était l’automne
Pareille à une mouche verte
S’il voit en chaises les humains il doit être malade
L’homme surprit par le chagrin
Le poisson rouge qui avait refusé la mort
Les deux se meuvent côte à côte comme des nuages
Qui ressemble au marbre sans être de marbre
Qui ressemble à l’éponge bien qu’il soit une éponge
Un arbre de grenade parfaitement lui-même
Voici un chagrin aussi vrai qu’une montre de langouste
Urgence d’une ligne d’horizon qui s’enroule comme
                                                                 un coquillage
Pour pénétrer tel un soleil couchant dans la salle
D’opération où flottent une rose un brise-glace et une
                                                                               bière
Avant de se muer en vitre une taupe est couchée sur               
                                                                         le flanc
Une douce pierre tombale se dresse à côté d’une belle
                                         femme au chapeau de soie
Indifférente à son chagrin bruyant
Tout cela n’était qu’une méprise d’un garçon d’hôtel
Regarde par-delà la blouse de ce chirurgien glabre
Un énorme dahlia robuste
Aucune chance
De sortir d’un seul pas du dimanche de Salomon
Aucune chance
De voir un liseron à la lumière du jour s’enfuir de l’es-
                                                          thétique du liseron
Oh yes indeed !
Par la nuit claire des sangliers
Je m’éprends d’une main si triste
Je m’éprends d’un incendie silencieux
Et pourtant ce paysage aussi distingué qu’un cortège
                                                                          Funèbre
Trompe le décorateur d’intérieur
Non pas à cause d’un ange manchot
Mais pour le seul aveu de la femme
Des insectes aussi vieux que le métier bancaire et des
                                                                menus propos
Souvent rêvent de l’océan
Coquillages contemporains et nuages abscons
Un penseur monothéiste interpelle les Espagnols
Par leurs  bracelets en or massif…
La nuit claire toujours se ternit
Comme les fleurs du Japon
La liberté du jade
La pente ne retient pas l’homme la pente telle une
                                                            chute d’eau…
Loin d’ici vécut un prophète rien à voir avec nous
Solitaire comme un pistil
Le ciel des bivalves là demeure le dieu le plus 
                                                                intègre
D’un côté se trouvait une perle
De l’autre une brebis
Pureté d’un mendiant en difficulté
Sur le sable il voit sans cesse dans son rêve des
                                                                gobelets
Un violon d’ambre sa propre cheville un poisson rouge
                                                                   de sa suite…
L’interrogatoire tombe sur ses épaules comme eau
                                                                     distillée
Le soleil engloutit dans la mer
Se retrouve telle une plume au fond de sa poche
Le complot qui donnera forme à ses mains
Est plus évident que mauve sur mauve
Et le mirage de l’infini donc est magnifique
Car c’était le dispositif  le plus simple
A ce moment des papillons innombrables
Voilà ce que cherche le mendiant
Le bronze d’un canard
Le roseau du Lac de la Fraîcheur qui hésite devant
                                        la véritable Vénus de Milo
Le héron cendré qui adroitement échappe à de lon-
                                                               gues douleurs
Aussi bien que le fermier qui a le don de clairvoyance
Sont déjà entrés au musée immémorial
La mer la mer et le sable vus par les interstices d’un
                                                               halo lumineux
Les chevaux rapides de la prison
Transportent une nuit de juin à l’insu de tous
La Création de la Terre fut accomplie en une nuit
Le hérisson dit sa reconnaissance
La main de l’été s’étire comme Morphée
Tel un absurde bouquet de fleurs
Pareille à la mort arrogante au palais du roi
La santé en prend un coup
La nature dans sa splendeur   Voici ton dictionnaire
                                                                     de poche
Tu éprouves sa force comme des fleurs de chrysan-
                                               thèmes bien comptées
Octobre = périscope
Regarde la logique minimale dans le miroir
Accompagnée de quelques souvenirs tropicaux savon-
                                                                                 neux
Sa sagacité d’onyx veiné de rouge
Une erreur de calcul dans la clarté de la lune et un
                                                  lapsus de dynamique
La statistique affectueuse monte la mèche de la lune
La reine enivrée de roses ses déchets paisibles violacés
Est-ce là ton désir très pur ?
Un buste de porcelaine ?
Fantôme d’un gouverneur en toute son innocence
Fantôme où tout a été biffé
Rose à l’apparence d’un elfe
Rose famille de poissons
Rose avec son allure
Rose drôle
Rose insensible
Rose flamme

Une incarnation tel un éclat de tonnerre
L’abstraction de ces hautes mers ne dit rien
Les années d’enfance des fleurs du méridien très loin
                                                  de toute météorologique
Font des rêves d’une entière douceur
L’âge de pierre fut celui des floraisons géantes
La mégalomanie laisse une cicatrice bleu marine et
                                                    plonge dans la mer
Ainsi se terminent les bavardages
Le jeune marié  sent la mer
Un métromane de la capitale
Déjà telle une méduse la boussole se perd dans la
                          contemplation de la Mer intérieure
Avec le calme du pays qui fut le berceau des arts
Ah ! j’oubliai les mots de l’âme
Et à peine eut-il poussé ce cri
Qu’il se lance après un instrument vocal rouge carmin
Tigre naufragé
La passion de la musique s’épanche en piaillements
En face la mer à perte de vue
Et toute l’année sans répit la neige
O Mater Dolorosa !
Voici éclose la déclaration d’intention
Malice suprême et caméléon
Puis la musique valeur mobilière se joue sous les
                                                                     nuages
Le soleil couchant n’est qu’un aphorisme
Un cerveau bleu cobalt n’est qu’une divagation discrète
Il est fatal que les spectres porteurs de la Bonne Nou-
                                         velle aient tant de charme !
Choisir les mots tout ce qu’il y a de plus en vogue
Et parler sans  pour autant oublier le temps qu’il fait
Voici l’universelle morale blanche
C’est une musique où l’observation seule resplendit
La poudre de riz ne donne jamais un teint mar-
                                                    ron     Ce défaut
Ne saurait empêcher
La cithare à sept cordes de traverser les rayons du
                                                                         soleil
Apollon prend son repas
Et une fois disséqué plus rien ne reste dans le paysage
Respect
Une violette tricolore au bel écho arrivée jusque-là de
                                                                la terre ferme
Je n’ai noté que la joie
Par exemple la dinde ou au contraire un échalas de
                                                                        garçon
Le zinc n’a rien à voir dans mon histoire
Semblable à un paysage avec des satyres
Sur l’autre page rien n’est écrit
La joie argent argenté
Voici l’intelligence de Salomon
La pomme du torero qui croît à l’apparition des
                                                                 spectres
Soudain une belle âme trouva de la chaleur en leur
                                                                      présence
A cet instant je découvris une parenté entre l’homme
                                                                      et l’ange
Le roi noir né dans l’écume des mers donne son
                                               accord à l’arc-en-ciel
Que vouloir de plus
J’y reconnus l’ibiscus de jadis
Egarement sans remède du tétraèdre
L’équilibre tel un oracle naît bientôt sur les lèvres de
                                                                       la jeune fille
Leur rouge amarante se confond avec la mer
La jeune fille oublieuse de la pluie court comme le vent
Les jeunes filles prêtent toutes leurs traits à l’unique
Une vérité neuve sans venin
L’Espagne des Esquimaux
D’aventure j’aperçois les raisins encore verts
C’était un tour d’adresse de la nouvelle lune
A cet instant la jeune fille déjà n’est plus là
Le démon de Mammon tient prêtes des pièces d’or
                                                               toutes fraîches
Pour son métier très particulier
En cette saison tranchante
L’atavisme du  lion redevenu fauve
Est tourmenté par l’inspiration
Mon histoire par une nuit de lune s’évapora avec la
                                                                            flûte
Et comme pour l’alcool de riz il n’en reste que la part
                                                            la plus ancienne
Ville couleur châtaigne    ville où se meuvent les pois-
                                                                   sons rouges
Un cheval coudes sur la table s’élance sans bruit
L’homme à jamais impénétrable
Ronds bleus les genoux d’une femme assise
Où que l’on cherche partout les feuilles vertes fendues
Parfois l’homme se perd dans sa contemplation
Voici une arène ronde comme un bébé
Une tête grecque incomestible
Et les voiles de Maria
Ta couleur sang recouverte d’un bleu foncé commercial
Me rappelle les mouvements des anges au firmament
La neige de l’alcool
Se mue en ton collier
Ton histoire
Est brève comme le pouls des étoiles filantes
Ou le paradis des hyménoptères
La première moitié de ta vie et l’ellipse de ce qui reste
                                                                             à vivre
Voici ta trouvaille
Métaux précieux dans l’air contaminés par les mœurs
                                                            d’un dieu nouveau
Et aussitôt une brusque
Campanule si violacée au parfum de refus et forte de
                                                                               sa foi
En cet instant vacant
Se meuvent toutes les poignées avec leur distinction
                                                                      singulière
Soleil bon marché
Mélodie maléfique
Le supplice de ses flexions
Armures somptueuses      à quoi bon déjà
O Roi !
Quels temps
Voici mademoiselle votre fille
Voici Mademoiselle sans un mot
Une épingle qui s’enfuit de notre espace
Cette épingle ressemble à Mademoiselle
Un parfait mois de janvier
O perle !
Que de beaux mots que de belles phrases
L’occasion et le rêve est rêve sur rêve
Le moindre petit sou est toujours un sou
Cet amour avait tout d’un amour
Reproduction par scission c’était un art voué à la
                                                      lampe d’acétylène
Spectrum qui ne lance aucune question
Voici le Roi
Matière inorganique en or pur
Un jeu imperceptible comme une rose souriante
Le gel qui fige les fossettes de Gargantua
Etoile désaxée     voici la jeune fille aux yeux bleus aux
                                                                    cheveux d’or
Etoile de l’hémisphère dans l’aquarium
Etoile des anges aux ailes rougies comme en deuil
Etoile couverte d’une poussière mauve qui ne se dévoi-
                                                                            lera pas
Etoiles étoiles

( Extrait de "Dada et surréalisme au Japon", Arts du Japon, 
Vera Linhartova, Publications Orientalistes de France 1987 )