jeudi 29 octobre 2009

JEAN-PIERRE DUPREY - Deux poèmes -

A LA BONNE BOUCHE

Ma poitrine était bleue, je perdais du ciel.
Non, je ne me fierai pas à la largesse des choses. J'irai
autour. Je descendrai plus bas, élargissant mes habitants,
mes empreintes fermant mes crevasses, mes animaux durcis
dans le temps...
Le vent était tout de feuilles mortes et les fantômes
toute la chambre.
Le vent s'enrichissait d'amers, la lune argentait un cœur
du ciel.
Et l'effroi se chargea du reste... Les fantômes donnaient
des exemples de caresses, mais nos mains ne s'y touchaient
jamais.

Cela me courait sur la peau, hurlant un air qui m'était
respiré. A l'autre bout, il y avait un dieu. Je lui criait :
"J'abandonne, mangez-moi la langue ! "
Et les fantômes mangeaient.



UN SAFRAN DE MARS

Le maître de l'Amour se maintient au carreau de lune,
Ses yeux, tirés du blanc, découvrent l'ombre de Ce-qui
n'est-pas.
"Donnez-nous, disait-on, ce qui manque à l'étincelle
pour faire du bois, ce qui manque à la rivière pour mouler
une forêt de feu ! "
La machine de l'Amour battait la campagne, hâtait
les saisons. L'échelle de son ombre dépassait l'horizon.
Il y est un soleil et quelques allumettes perdues dans la
boîte du vide...
Une étoile avec la chair de l'œuf.
Un grand rideau d'objets. Rien devant et tout APRES.

(Extrait des "Œuvres complètes" Editions Christian Bourgois)

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