jeudi 10 mars 2011

Katrine Mafaraud

La tête  tranchée

Dans ce cerveau-ferblantier qui traîne
Tant d’impossibles deltas
Dans cette tête mal mise en équilibre
Comme sur un cendrier
Dans cet esprit nomade et planeur
Rhapsode n’ayant plus que les mots
A unir à détruire aussi
Dans cette infirmité essentielle
Qui embrase le cou et ses colliers d’organes
Dans cette bouche-batterie
Où gémit le laser d’un muscle en sang
Dans cette incohérence faciale
Où la prunelle avant toute autre
Saute le pas sans jamais s’identifier
Décryptant pour une chaleur interne
Et douteuse ayant mal sans personne
Dans cet écho qui part de l’œil vision
Et atteint l’œil digestif du sexe
Dans ce chaos de pensées-foutre
Et de sensations pyramidales
Dans ce blockhaus de peaux d’écailles
Et de phalanges aux doigts
Dans cette demeure troglodytique
Et résolument souterraine
Où le corps est désavoué
Par ses propres visions
Dans ce trou veineux armé de couleurs
Je me dissous irrémédiablement.

Transfiguration

Le Dôme n’est pas vert bouteille
Il est vert d’eau soutenu eau de rivière
Mes yeux s’oblitèrent à chaque rencontre
Et je ne peux les retenir que par l’ombre
De mes mains qui sèchent
De mes doigts qui s’usent
Et de mes bagues qui ne servent à rien d’autre
Avoir en fin de corps
C’est-à- dire au commencement de tout
Quand l’autre dégage sa chaise
Et sort sa première cigarette
Avoir des dagues des bois des cornes et des griffes
Des poings au sexe et des coudes aux hanches
Des os saillants des muscles larges
Des écailles sur les zones érogènes
Une carapace sur le mental
Et un carcan pour la tendresse
Etre chauve être bistre
Ophidienne et tranquille
Putrescente et imprenable
Déformée défigurée
Immonde et assise
Le Dôme ne libère pas l’écho
Et mes restes s’accrochent une fois de plus
Des restes fragiles un peu rosés
Noués souvent de syllabes
Et rarement de mots
Des restes bon marché
Puérils et femelles
Il faudra donc s’habiller de pourpre et de carmin
Attendre la transfiguration
Utiliser tout comme une arme
Préparer préméditer et tromper
Puis se taire
Il faudra en attendant d’être un monstre
Oublier définitivement le langage.


(Extraits de "Je suis laide aujourd’hui comme une cathédrale" - Pierre Perrin – Possibles éd., 1978)

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